Les Nouvelles religieuses — No 371 - 18 mars 2011
La popote des prêtres ou les déjeuners des jeudis
Les prêtres du doyenné de Nice-Ouest se retrouvent à Sainte-Hélène de manière régulière depuis une grosse poignée d’années tous les jeudis pour déjeuner dans la bonne humeur. La rencontre est nourrie par des échanges fraternels, des anecdotes et des rires.
Il est midi et demi. Les prêtres sont arrivés. Tous debout autour de la table dressée, ils consacrent le premier instant au bénédicité. Les agapes peuvent commencer. Un bienfait de Dieu... «et des cuisinières! », ajoutera un convive pour qui l’on doit rendre à chacun ce qui lui est dû. Annie et Claire, des bénévoles de la paroisse, déposent les plats au fur et à mesure et laissent découvrir ou permettent d’apprécier, comme tous les jeudis depuis des années, leurs talents de cordons bleus pour que le repas soit bon, équilibré, conforme aux goûts du plus grand nombre et, parfois, au régime de l’un ou de l’autre. On ne peut qu’aimer car tous les mets sont maison. Apres l’entrée, constituée le plus souvent de crudités, c’est blanquette de veau, ou chili con carne, ou aïoli, ou rôti de bœuf, ou... L’accompagnement n’est pas mal non plus, « surtout quand c’est du gratin dauphinois ! » s’exclamera un grand amateur de gratin dauphinois.
D’entrée, le ton est donné, manifesté par les visages épanouis et confirmé par des rires. On se rassure sur la santé d’un absent, on se réjouit de la présence d’un invité, on pense à une relation commune : « Il y a longtemps qu’on ne l’a pas vu, comment va notre ami? Vous lui ferez un gros bisou de ma part. » Sans trahir l’intention, on se contentera peut-être de transmettre un bonjour très chaleureux. D’autres plats arrivent. On met les verres à jour. On parle de l’actualité anecdotique, on rit de manière bon enfant d’une situation burlesque, on fait des jeux de mots, on teint la gravité pour rapporter un propos léger, on ajoute un peu de poivre.
Oui, ce partage du pain et du vin est celui de l’amitié des serviteurs de Dieu dévoués à l’Église et hommes parmi les hommes. Après avoir planché, discuté, décidé, avant de retrouver les réalités de la mission et les vicissitudes des ténèbres et des lumières paroissiennes, la pause s’impose. Avec un sacré coup de fourchette. «C’est délicieux! » On parle des méthodes de pêche dans telle région du globe, on évoque un excellent article paru dans Les Nouvelles religieuses, lu certainement avec gourmandise, on sort de bons mots, on rit beaucoup et l’on fait honneur aux produits de la terre, dons du Ciel. « Je te ressers une tranche ? Et de ce côté, en attendant le dessert, voulez-vous encore un peu de salade, avec le fromage ? Tenez. » L’ambiance est loin d’être fade et les plats ont un goût de revenez-y. On rappelle avec une once d’inquiétude que la terre a tremblé du côté de Menton, épicentre en mer. « Encore une histoire de plaques... sismiques celles-là ... » s’amuse a placer avec un air de sous-entendu un esprit taquin à l’adresse de son vis-à-vis. « En tout cas, moi, rétorque celui-ci, de ma colline je ne crains pas le tsunami et je prierai pour vous qui restez en plaine. » La répartie est des plus amicales et les mines radieuses témoignent des muscles zygomatiques en plein travail. À chacun son tour, non ? Les meilleurs moments ont une fin. Qui viendra jeudi prochain ? Tous.
Christian WATINE
Note du rédacteur en chef
Publier en plein Carême un reportage sur la « popote des prêtres » n’est ni une faute de goût, ni une incitation au capital péché de gourmandise, mais bien un impératif du bouclage du précédent numéro qui nous a obligés au report de la parution du présent article.
Les Nouvelles religieuses — No 371 - 18 mars 2011
